Transcultures 2013, le réseaux comme support de création – arts.numeriques.info, une plate-forme web pour les créativités connectées

Transcultures 2013, le réseaux comme support de création – arts.numeriques.info, une plate-forme web pour les créativités connectées

En soutenant le projet de recherche arts-numeriques.info initié par l’artiste Jacques Urbanska (début 2010), Transcultures entendait dynamiser les arts multimedias en croisant les compétences ainsi que les circuits de diffusion. A ce jour, il existe encore peu d’overview pour ces créateurs qui ont intégrent les nouvelles technologies et le Web en devenir. Il s’agissait pour Jacques Urbanska et Transcultures de développer des outils avec des veilles permanentes, des lieux d’intersection, d’information mais aussi de collaboration et de diffusion sur la toile en interaction avec d’autres espaces virtuels et physiques.

Nous avons rencontré son concepteur qui nous en dit plus sur ce projet en plein développement et qui à ce stade premier a déjà réussi à fédérer nombre d’opérateurs/créateurs/œuvres/projets numériques de part le monde, mais également de la Fédération Wallonie-Bruxelles et à leur donner une visibilité en lien avec l’international.

Pouvez-vous nous faire un rapide bilan de ce travail mené dans le cadre de arts-numériques.info que vous avez initié voici bientôt 2 ans ?

arts-numériques_anthologie-textes_transcultures-2012Jacques Urbanska : Début 2010, j’avais fini la première phase de mon projet Anathèse (initié avec François Zajega et qui avait reçu le soutien de la Commission arts numériques de la Fédération Wallonie-Bruxelles fin 2009). Ce projet performatif comportait la création d’une base de données Web. J’avais donc rassemblé une base de données de plusieurs milliers d’entrées, reprenant des structures, des blogs, des festivals, des magazines, des bases de données, des émetteurs d’appels à projets… faisant partie d’un milieu « arts numériques » de facto. Tout était classé, répertorié, détaillé, et mon plus grand désir était de partager le fruit de mes recherches le plus vite possible (en fait c’était une période étrange de classement boulimique). J’ai mis mon projet artistique entre parenthèse et j’ai commencé un blog (digital-arts-numeriques-diary.be), mon but était simplement de partager : j’avais décidé d’écrire un article par jour, et ce pendant 6 mois, 7 jours sur 7. Après quelques mois, je suis rentré en contact avec toute une série de structures et de personnes, dont Malo Girod de l’Ain, directeur de Digitalarti(plateforme-média-lab de référence pour la création numérique). Nos nombreuses discussions et son soutient ont été importants dans le développement de mes recherches.

Je voulais créer, à terme, un outil sémantique capable de parcourir le web pour ramener tous les appels à projets susceptibles d’intéresser les artistes multimédias. Une espèce de moteur de recherche « google barre » intégré à un navigateur, dans laquelle il suffirait de taper des mots clés pour avoir des réponses très pertinentes.

Aujourd’hui, cet outil n’est pas encore tout-à-fait là, mais plusieurs maquettes ont vu le jour. Ma recherche est terminée et je l’ai intégrée dans mon projet artistique (rebaptisée WebWailingWall). Que reste-t-il de ces deux années ? Ce qui était au départ mon « bac à sable » est devenu un portail qui comprend mon blog, des moteurs de recherches, une veille journalière, une forte présence sur différents réseaux sociaux innovants, une base de données, des milliers d’informations automatiquement mises à jour, une communauté facebook et twitter (@arts_numeriques@digitalart_be@processing_org…) fortent de plusieurs milliers de followers….

Le portail diffuse, en outre, chaque jour, des dizaines d’appels à projets/résidence de par le monde et des recherches sont possibles. Enfin, mi 2012, la collaboration avec Transcultures, Centre des cultures numériques et sonores installé à Mons et rayonnant aussi dans la Belgique francophone et à l’international, est devenue plus étroite et nous avons décidé de lancer plusieurs projets ensemble à moyen ou à long termes.

En plus de cette recherche spécifique aux arts numériques, le projet a aussi généré une trentaine de veilles Web sur d’autres sujets (qui me serviront pour mon projet artistique) : On peut y retrouver des champs d’investigation comme la catastrophe de Fukushima (@fukushima_actu et @fukushima_fr), les différents mouvements sociaux qui secouent le monde (@revolution_info@Occupy_USA@Occupy_www,@OccupyBelgium), des veilles sur des sujets plus précis d’actualité (@sarkozy_info@Belgique_info,@anti_fn@OccupyWomen@medseapollution)…

Quelles ont été les principales difficultés que vous avez dû surmonter ?

Je pense qu’au début, Philippe Franck, directeur de Transcultures (ou mes autres « partenaires), ne comprenaient pas très bien où je voulais en venir, il faut dire que, au-delà d’une certaine intuition et d’une intention forte, j’avais encore du mal à bien circonscrire ce projet qui peut se révéler à géométrie variable et donc à l’expliquer en terme simple. Je savais qu’il y avait un problème au niveau de la circulation de l’information, que peu d’artistes étaient au courant de la multitude d’appels à projets/résidences lancées par des structures qui étaient en demande. Mais je n’arrivais, ni à bien le démontrer, ni à envisager de proposition claire (ou tout du moins réaliste). Je savais également que « TransWeb », la section de Transcultures développant des projets Web, cherchait à se redéfinir depuis quelques temps, simplement parce que Transcultures a développé énormément de projets (festivals, résidences, échanges, expositions, événements hybrides…) ici et à l’étranger et qu’il fallait faire des choix. On a donc eu pas mal de réunions enflammées, mais il a fallu attendre que tout ça se mette en place, que ça se clarifie. Cela s’est fait à la faveur de la Biennale des cultures numériques, Les Transnumériques, que Transcultures a organisée en mai/juin 2012 (Mons et Bruxelles), où j’ai été invité à participer.

Pourquoi avoir choisi de travailler avec Transcultures ?

jacques-urbanska_percept_transcultures-2012Pour toute une série d’évidences dans un premier temps : Transcultures avait co-produit mon premier projet « arts numériques » ; il y avait déjà une certaine confiance, un véritable soutien et un dialogue régulier. Venant des arts de la scène (Conservatoire Royal de Liège), l’approche réellement interdisciplinaire de Transcultures m’intéressait également. Je voulais en tous cas, une structure publique, d’ « intérêt général ». Transcultures est une des 2 structures pionnières pour la création numérique en Wallonie-Bruxelles (la seule en Wallonie d’ailleurs) ; c’était vraiment très important pour moi de revenir sur la Belgique francophone après avoir regarder ce qui se faisait ailleurs.

Pour finir, je dirai qu’il y a cette accointance chez Transcultures pour le réseautage, le travail en réseau (je ne parle pas du web cette fois, mais d’humain à humain), le tissage de lien et le partage… C’en est presque devenu une marque de fabrique, de tradition que chacun des projets suscités ou liés à Transcultures essaient non seulement de perpétuer, mais de redéfinir aussi. Cette approche « connective » convenait parfaitement au projet.

Quels sont vos projets concrets pour l’année 2013 ?

Je dirais que le calendrier s’étalera plutôt sur 2 ans, jusqu’en 2015, année de Mons Capitale européenne de la Culture auquel Transcultures participera. Pour commencer, il y a d’abord TransWeb bien évidemment, qui pourrait devenir un laboratoire de recherche et de développement Web, non seulement pour produire des projets propres à Transcultures, mais au-delà pour prendre en charge aussi les volets pédagogique et social susceptibles de réunir d’autres artistes, structures et projets numériques.

Dans le concret et l’immédiat aussi, il y a l’ouverture de plusieurs portails spécifiques, dont un premier (sur les arts sonores, ce qui n’existait pas vraiment sur la toile) qui prendrait place sur le site citysonic.be (associé au festival international des arts sonores, lequel est en lien avec d’autres structures, événements et artistes) et un deuxième sur le site de la transnumeriques.be (là aussi avec également un réseau qui excède celui de la biennale). Ce sont deux lieux Web qui sont très fréquentés lors des festivals qui y sont associés, mais qui étaient moins actifs hors période événementielle. Il s’agira dans un premier temps de transformer cela et de proposer 2 véritables plateformes d’informations et d’échanges là encore dans un esprit fédérateur et ouvert à plusieurs publics.

TransWeb va également reprendre son activité d’entraide, de passation du savoir Web. Offrir à de petites structures (pas seulement artistiques) des outils légers et performants, des conseils en community management, en veille Internet… pour des prix défiant toute concurrence. La « cible » de TransWeb, ce sont des personnes qui n’ont pas un gros budget, mais qui ont un peu de temps et l’envie d’une certaine autonomie. Des projets plus spécifiques se mettent aussi en place via mycommunitymangement.be ou le projet le webaducoeur.be (plusieurs fois présenté en 2012, dont une fois à la biennale Transnumériques).

Il y a aussi un gros chantier, mis en route depuis quelques mois déjà, sur la diffusion des arts numériques et sonores par Transcultures. Une redéfinition des objectifs et surtout une complète transformation des moyens et des outils mis en oeuvre. Cela passe, tout d’abord, par l’optimisation de la vitrine de Transcultures qu’est son propre site Internet (et surtout la section diffusion). Mais pas seulement. Il est encore trop tôt pour en parler, c’est un projet qui demande des ressources et du temps… certains changements seront flagrants et rapides, mais la plupart seront sur le long terme.

Enfin, et sans trop dévoiler certains projets en gestation, il y a également une volonté de continuer à soutenir des initiatives du type SPAMM (le « Super Art Moderne Museum » qui a été présenté physiquement pour la première fois à Bruxelles, à Galeries, lors des Transnumériques 2012 avec des dizaines de création en ligne par des artistes internationaux) ou de proposer de nouveaux concepts d’artlabs, en ciblant de nouveaux publics. Sans oublier la poursuite des projets européens en réseaux déjà entamés par Transcultures : PINC (nouveau projet de plate-forme pour les cultures nomades et innovantes regroupant des opérateurs de 7 pays européens), Park in progress (avec le réseau des Pépinières européennes pour Jeunes Artistes) ou d’autres avec le Canada (Montréal, Québec…).

 

Qu’en est-il de vos projets plus directement artistiques –nouvelles formes d’installations, performances…- que vous développez en reliant la dimension physique à celle du réseau, avec un intérêt particulier pour les mutations sociétales ?

jacques-urbanska_iframe_transcultures-2012Ils suivent leur chemin. Je suis plutôt un créateur assez lent. Je produis peu. En ce qui concerne l’installation en réseau iframes, une maquette de travail a été présentée (en complicité avec Vincent Paesmans), avec succès, lors de la dernière édition des Transnumériques, dans l’exposition Connectic’arts à la Maison des Cultures de Saint-Gilles. Cette première proposition « in progress » a intéressé le Mundaneum à Mons, qui l’a sélectionnée pour son exposition Renaissance 2.0. Elle a été adaptée (un merci à Lionel Maes de la Villa Hermosapour son aide) et se retrouve donc en projection centrale dans ce magnifique centre d’archives, précurseur de l’Internet, jusqu’en mai 2013. La finalité du projet dont le titre générique est WebWaillingWall (le Mur des Lamentation Web, un énorme mur Web interactif) à plusieurs volets… cela prendra un peu plus de temps, je dirais que je recommencerai certainement à travailler dessus dans le courant 2013. Son sujet étant les différents mouvements sociaux qui secouent le monde, je pense qu’il sera, malheureusement, toujours bien d’actualité dans les années qui viennent…

Propos recueillis par Julien Delaunay
fin juillet 2012