À partir de l’héritage encore bien vivant de Pol Bury, Transcultures a proposé dans sa ville natale de La Louvière (Wallonie), en avril et mai 2023, plusieurs événements.
Des évènements liés aux arts numériques (XR Bury en 2 volets : un symposium « L’art à l’ère de l’intelligence artificielle » conçu en partenariat avec le laboratoire CiTu-Paragraphe de l’Université Paris 8, et un parcours en réalité augmentée en ville ] P P P [ Pol Pipoling Project réalisé, pour l’occasion, par La Société i Matériel) et sonores (avec le projet album et live Sonic Spheres). Retour sur ces traits d’union féconds entre la cosmogonie d’un artiste (trans)historique et les avant-postes audio-numériques.
XR Bury est un projet à plusieurs volets (symposium, workshop, résidences, parcours XR) alliant partage de la pensée et créativité à tête chercheuse, qui trouve son inspiration dans l’œuvre et la vision de ce créateur/explorateur pluridisciplinaire qu’était Pol Bury (voir notre article introductif précédent sur son trajet et sa vision). Les 27 et 28 avril 2023, s’est tenu à la Maison des Associations de La Louvière, le symposium « L’art à l’ère de l’intelligence artificielle ». Il a été co-organisé par Transcultures, Centre des cultures numériques et sonores et le laboratoire CiTU-Paragraphe de l’Université Paris 8 qui regroupe, depuis sa création1 en 2007, une équipe de professeurs, chercheurs associés et doctorants en Sciences de l’Information et de la Communication et Humanités numériques issus d’horizons différents particulièrement attentifs aux projets créatifs. Le CiTU, une des branches de l’important laboratoire interdisciplinaire Paragraphe (sous la direction de Khaldoun Zreik), s’appuie également sur un large réseau international (avec notamment l’organisation de plusieurs séries de colloques (dont Hyperurbain, Design 1.0, Texte & Image…) en lien avec d’autres universités et partenaires d’autres continents.
Il s’agissait pour ce symposium (premier numéro d’une nouvelle série – lancée par le CiTu-Paragraphe/Paris 8 en partenariat avec Transcultures et les Pépinières européennes de Création – sur cette thématique aux interrogations et enjeux multiples) pour les invités internationaux d’interroger plusieurs problématiques qui s’inscrivent dans une actualité des mutations liées au déploiement des technologies numériques et pourquoi ce déploiement répond à des transformations nécessaires de notre conception de la diffusion et la communication des informations sur nos territoires actuels et virtuels.
Après notre rappel de la thématique et du parcours transversal de Pol Bury que l’on peut considérer comme un précurseur – certes trop indisciplinaire et poétique que pour tomber dans un quelconque dogmatisme théorique – des arts numériques sans qu’il ait pour autant sauf, pour certains traitements graphiques (notamment dans ses Ramollissements), à la fin de sa vie utiliser les technologies digitales, Antonella Tufano (Sorbonne/Paris 1) a bien pointé l’interprétation cinétique essentiellement urbaine, spatiale, antigravitationnelle, qu’il a montré dans ses œuvres et qui sont des dispositifs de réfraction de l’espace.
C’est dans ce sens, d’après cette architecte-urbaniste italienne, que Bury « transforme l’espace réel en un « cristal », au sens de la philosophe Christine Buci Glucksman2, et ouvre aux multiples dimensions du virtuel. La figure du miroir, traduisant les lectures de Gaston Bachelard, est une hétérotopie fructueuse où les limites de l’œuvre sont effacées : on rentre et on sort comme on s’immerge dans un espace digital. Elle nous a introduit subtilement à cette question du miroir (et on connaît l’attrait de Bury pour les miroirs déformants et les jeux de reflet également dans ses sculptures) comme anticipation d’un espace virtuel numérique.
Khaldoun Zreik est revenu sur les spécificités et enjeux fondamentaux de l’art à l’ère (« provoquer, capter et sublimer une information latente, explorer le ”paranormal” ou ce qu’on ne perçoit pas d’ordinaire… l’art comme prothèse sensorielle qui est aujourd’hui aussi technologique y compris dans l’usage des robots ») de l’IA (qui exploite l’intelligence collective – une méta intelligence, banalise l’expertise, formalise l’informel… ce qui peut être inquiétant mais qui démocratise aussi certaines catégories de connaissance) avec ce questionnement commun que posent à la fois l’IA et l’Art sur nos différentes formes de créativité, tandis que Philippe Boisnard, artiste numérique, auteur et enseignant de formation philosophique, s’est livré à une foisonnante critique phénoménologique des processus artistiques liés à l’IA (avec l’émergence, depuis l’été 2022 au niveau du grand public, des applications IA graphiques et textuelles telles DALL-E 2, Midjourney, Stable Diffusion, GPT 3 ou encore le désormais célèbre et controversé ChatGPT), soulignant le manque de mise en question des processus propres des IA quant à la production d’images, dans un déferlement d’images qui s’est accompagné d’une accentuation du mimétisme morphologique-anthropologique. En quel sens, s’est-il demandé, une analyse phénoménale permettrait de se saisir des potentialités propres de la création par IA, aussi bien graphiques que linguistiques. […]
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> Voir les différents événements proposés par Transcultures dans le cadre du Centenaire de Pol Bury (projets XR Bury et Sonic Spheres)
Turbulences Vidéo #112 - Sommaire
/// CHRONIQUES EN MOUVEMENT ///
- Que sont mes amis devenus ?, par Jean-Paul Fargier – p.8
- Nuit blanche Oxymore biblique, par Jean-Paul Fargier – p.20
- Voir. Venir., par Stephen Sarrazin – p.26
- Hypernuit, par Paul Ouazan – p.28
- Mr. Blaise scientifique, Mr. Pascal jardinier, par Élise Aspord – p.32
- Pol Bury, un parcours et une œuvre trans avant-gardistes, par Philippe Franck – p.38
- Bury dans les livres, par Philippe Franck – p.44
- XR Bury – Sonic Sphères : entre réalités et sonorités augmentées, par Philippe Franck – p.46
/// PORTRAIT D’ARTISTE : CHRISTINE GEOFFROY ///
- Entretien avec Úrsula San Cristóbal, propos recueillis par Gabriel Soucheyre – p.56 Soleil Noir, par Simone Dompeyre – p.62
- Le toucher qui attache, par Francisco González Castro – p.66
- Portrait vidéo : Úrsula San Cristóbal, par Gabriel Soucheyre – p.69
/// SUR LE FOND ///
- Que sont nos années de plomb devenues ?, par Alain Bourges – p.70
- Philipe (sollers) by Jean-Paul (fargier), par Marc Mercier – p.76
- Les oiseaux qui chantent aident les arbres à pousser, par Christiane Geoffroy – p.84 Figuration et configuration de quelques espaces insomniaques, par Claire Chatelet – p.90 Entre insolite & incongru, par Gilbert Pons – p.98
/// LES ŒUVRES EN SCÈNE ///
- « I am 60 » : Un corps, écran total, par Geneviève Charras – p.106
Production
- Les projet XR Bury et Sonic Sphère ont pris place dans le cadre du Centenaire de Pol Bury – Avec le soutien de la Ville de La Louvière, de la Loterie Nationale.
- Production : Transcultures, CiTu – Paragraphe de l’Université Paris 8, Pépinières Européennes de Création
- En partenariat avec CY Cergy Paris Université, l’Institut Acte, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Europia, Maison des associations – La Louvière